jeudi 17 septembre 2020

Le prince Azur et la princesse Yasmina

 



Dans un royaume situé aux confins de la terre, vivait un couple heureux : le prince Azur et la princesse Yasmina semblaient avoir été créés pour se rencontrer et vivre une éternelle romance d’amour.

Ils s’aimaient éperdument et ne pouvaient se passer l’un de l’autre.

Mais un jour, une imprévisible tornade s’abattit sur le palais en pleine nuit, inondant les salles d’apparat et précipitant les statues du décor à terre, les brisant irrémédiablement.

Anna, la dame de compagnie de la princesse, jeta sur les épaules de la souveraine une pelisse en zibeline, la  chaussa de bottines imperméables et l’emmena, encore endormie, dans la maison familiale qui avait traversé les âges, les guerres et les tempêtes sans dommage.

Elle installa la princesse dans un lit garni d’un édredon en plumes d’oie et lui chanta les berceuses de son enfance pour qu’elle se rendormît et reprenne des forces.

Pendant ce temps, le prince Azur cherchait désespérément l’amour de sa vie.

Anna avait agi avec tant de célérité, emmenant par ailleurs la princesse par une porte dérobée que peu de personnes connaissaient qu’elles ne furent aperçues par âme qui vive.

Lorsque la tempête fut calmée, le prince chevaucha, parcourant mille lieues mais il ne trouva nulle trace de sa bien-aimée.

La maison d’Anna avait de plus, une particularité : elle était invisible aux yeux des non-initiés car elle avait été conçue par une fée pour servir de refuge en cas de besoin.

Personne au palais n’avait le moindre doute sur la personnalité d’Anna. Elle avait été recrutée comme nourrice à l’origine puis on l’avait tout naturellement gardée au service de la princesse car elle avait l’art de calmer ses pleurs, ses angoisses enfantines et sa jolie voix cristalline mise au service d’un important panel féerique l’endormait lorsqu’elle ressentait une douleur.

On se rassura même en constatant l’absence d’Anna, y voyant une corrélation dans le supposé rapt de la princesse par un ennemi masqué.

Or, le véritable auteur de la disparition de la princesse était bel et bien sa nourrice, élevée ensuite au rang de dame de compagnie, jugée incontournable pour son éducation et son bien-être.

Au fil des années, Anna s’était tellement attachée à la princesse qu’elle ne supportait plus de la voir lui échapper par son amour pour le prince Azur.

Dans sa maison enchantée que personne ne pouvait voir, elle se montra douce, attentionnée, suggestive, traitant la princesse comme si elle était sa propre fille.

Elle la rebaptisa Ange-Lise, enferma sa robe de nuit, la pelisse et les chaussures dans une malle et lui fit revêtir des vêtements seyants, à la mode paysanne.

Elle orienta son éducation vers les coutumes campagnardes, lui apprit l’art de la cuisine et l’aida à cultiver le potager et à choisir les champignons des bois comestibles ainsi que les plantes qui pouvaient agrémenter un plat, servir de base à un potage ou à fabriquer des liqueurs, telles que l’angélique.

Ange-Lise semblait avoir oublié son passé et grâce à la vigilance d’Anna, le nom du prince Azur sembla effacé comme par un coup d’éponge magique.

Or, le prince Azur aimait tant la princesse qu’il ne consentit pas à l’oublier comme on le lui suggérait dans son entourage.

Il refusa farouchement toute proposition visant à faire venir une princesse au palais.

Prétextant un besoin sportif, il faisait seller son cheval Topaze chaque jour et partait en promenade.

En réalité, il ne cessait de chercher Yasmina et fouillait méticuleusement chaque recoin des environs.

Il fut un jour récompensé par ses efforts car il découvrit, épinglé dans un buisson épineux, un ruban qui appartenait à la chemise de nuit de la princesse.

Il fut si heureux qu’il marcha une bonne heure en tenant Topaze par la bride, à la recherche d’un nouvel indice.

Il arriva près d’un ruisseau aux eaux vives. Topaze but longuement et le prince observa un ballet de libellules en s’asseyant sur une pierre polie par le temps.

C’est alors qu’il la vit : son cœur se mit à battre follement. Elle était devant lui, sa princesse, de l’autre côté du ruisseau. Vêtue de manière rustique mais seyante, elle avait un panier à la main et cueillait du cresson et des plantes que le prince ne connaissait pas mais qui n’avaient aucun secret pour sa bien-aimée, ce qui était une grande nouveauté aux yeux du prince mais qui ajoutaient encore à sa beauté.

Se sentant observée, la princesse aperçut le prince et lui adressa un signe de la main.

Désappointé en constatant qu’il n’avait pas été reconnu, le prince chercha un gué, attacha Topaze à un saule et franchit le gué en veillant à ne pas effaroucher la princesse.

Lorsqu’il l’aborda, il eut l’esprit de lui présenter le ruban qu’il avait découvert dans le buisson.

«  Ce ruban vous appartient-il, gentille demoiselle » lui demanda-t-il, supposant, à juste titre, que sa bien-aimée était sous le coup d’un enchantement.

«  Mon Dieu, oui, dit la princesse d’une voix blanche et vous, messire, ne seriez-vous pas le prince Azur » ?

Pour vous servir, princesse Yasmina dit le prince en tombant à genoux.

Délivrée de son enchantement, la princesse le releva et ils s’embrassèrent amoureusement.

Ils repartirent au palais, emportant le panier qui contenait les plantes que sous les traits d’Ange-Lise, la princesse avait appris à connaître.

La célébration de leur mariage fut grandiose et lors de la naissance de leur premier-né, la princesse tint à allaiter le nourrisson puis s’occupa de son éducation, refusant de recourir à une nourrice car, pensait-elle, en chacune d’elles pouvait sommeiller un émule d’Anna.

Elle n’éprouvait aucune haine à son endroit et elle souhaita et obtint qu’aucune poursuite ne fût diligentée contre elle.

La maison enchantée demeura donc inviolée et Anna fit contre mauvaise fortune bon cœur.

Elle vieillit doucement, se nourrissant des produits de son potager, de son verger et des plantes cueillies au bord du ruisseau.

Leur amour décuplé, le prince Azur et la princesse Yasmina vécurent heureux dans le palais du plus beau des royaumes.

 

 

 

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